INFOBRIEF – INFOLETTRE - Pour le bilinguisme français-allemand en Lorraine

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Notre Infolettre

Pour le bilinguisme français-allemand en Lorraine

Unser Infobrief

Für die deutsch-französische Zweisprachigkeit in Lothringen

Octobre 2023

 
     

Transmission intergénérationnelle…

Citation / Zitat :

« Jede Provinz liebt ihren Dialekt: denn es ist doch eigentlich das Element, in welchem die Seele ihren Atem schöpft»

Johann Wolfgang von Goethe

 

Éditorial / Leitartikel:

Oubliée la langue allemande, oubliée sa transmission…

 

Né dans l’immédiate après-guerre, je fais partie de la génération biberonnée à la langue allemande, langue historique de notre région mosellane, mais une génération qui en a « oublié » l’usage, comme langue de communication au quotidien, sauf avec la génération des parents et grands-parents.
Si la politique assimilationniste nationale est sans doute prégnante dans l’explication, le trauma de la guerre n’y est à l’évidence pas étranger et l’acquisition du français au cours préparatoire a pu aussi être ressentie (ce fut mon cas) comme une émancipation linguistique, culturelle, sociale…
Oubliée donc la langue allemande comme outil de communication, (un outil qui ne s’use que si l’on ne s’en sert pas…) mais oubliée également sa transmission aux générations suivantes pour qui l’allemand est devenue une langue étrangère, (ou, au mieux...) la langue du voisin.
Oubliée la transmission pour des raisons que nous considérions (sans doute, au fond de nous-mêmes) comme éthiques et philosophiques : ne fallait-il pas privilégier l’apprentissage de l‘anglais, langue des libérateurs, à celui de l’allemand, langue des incendiaires… ?
Si personnellement, je me remémore des mélodies et textes de chansons allemandes entendues au bal de la fête du village, je me suis éclaté ensuite aux rythmes des Beatles, des Stones...
Puis il aura fallu quelques années pour qu’une prise de conscience apaisée et distanciée permette l’engagement des plus convaincus en faveur de l’enseignement renforcé de l’allemand à travers la création des premières classes-euro, puis Abibac…
Une relance de la transmission, mais pour quel futur ?
La langue allemande redeviendra-t-elle langue d’usage en territoire mosellan ?
C’est tout à fait inenvisageable aujourd’hui.
Langue de culture et langue à vocation transfrontalière seraient les perspectives les plus réalistes.
Et il nous faudra, dans la sphère associative, éducative, politique,... redoubler d’efforts pour conserver le patrimoine linguistique et culturel et dessiner un futur bilingue qui ne pourra être que transfrontalier et transnational.
En nous adressant prioritairement aux jeunes générations !
Y a du boulot…

Léon Dietsch

Sommaire-Inhalt

Abdanken eines Veteranen des C.B.L. Vereins :

Charles Schneider Dr. Chir. Dent,Charles Schneider
Doktorand Med. Dent. Heidelberg

J'ai adhéré au Cercle Schickele section mosellane en 1974. Après 1990, l’association a été dissoute, faute de renouvellement de ses membres.

En 2008, Peter Gabriel, ancien Secrétaire général fondateur du Schickele Kreis, a recréé une section mosellane intitulée CBL,indépendante du Schickele.

Il considérait entre autres que les problèmes du bilinguisme mosellan étaient différents de ceux connus en Alsace et qu’il fallait être plus près du terrain.

L’année suivant la fondation, j’en fis partie. A présent, âgé de plus de 90 ans, et faisant le bilan de l’acquis de notre lutte depuis presque 50 ans, j’ai un grand sentiment de déception et me montre très pessimiste quant à l’avenir de notre bilinguisme.

  • Certes, les causes de cet immobilisme latent sont bien connues. Pour ne citer que les principales :un pouvoir politique central très réticent aux langues régionales,
  • une désaffection de l’apprentissage de l’allemand, de sa pratique et son enseignement,
  • nos élus politiques sont peu intéressés,
  • et, la plus importante, le désaccord des différentes associations quant à la définition de la langue régionale à enseigner par l’Éducation nationale.

En faisant l’état des lieux, nous nous trouvons, outre CBL, devant plusieurs « chapelles » diffusant leurs « dogmes », Sarreguemines, Forbach, Boulay, Freyming-Merlebach.

Le Cercle Schickele a entériné la refondation d’une section mosellane qui lui est rattachée, faisant office de doublon avec le CBL et interférant dans nos projets.

Certes, faire du prosélytisme pour le « Platt », officiellement dit « Francique », est vital pour sa survie. Mais vouloir imposer la variante locale du « Platt » en tant que langue régionale n’est pas réaliste. L’apprentissage du « Francique » doit être complémentaire à l’enseignement du Hochdeutsch, et non l’inverse.

L’Éducation nationale est également très dubitative pour considérer l’allemand comme langue régionale, étant donné qu’on l’enseigne comme langue étrangère.

Le Traité de Versailles imposait la poursuite du bilinguisme en Alsace-Moselle. Ainsi, à l’école primaire on enseignait l’allemand six heures par semaine. Ce fut le cas jusqu’en 1940. La Seconde guerre mondiale y mit fin, par réaction patriotique.

En dépit de cet immobilisme, il existe une lueur d’espérance : un bon nombre de villages et municipalités de Moselle ont engagé des animateurs en allemand intervenant dans les maternelles et les classes primaires auprès des enfants des familles intéressées.

En conclusion, tous les tenants de notre cause devraient se fédérer en une coordination faisant la synthèse de nos points communs pour parler d’une seule voix vis-à-vis du pouvoir politique et de l’Éducation nationale.

Charles Schneider  cha.schneider@wanadoo.fr

Point de vue / Stellungnahme :

Lieber Charles Schneider.
Ein Abdanken kann das wohl nicht sein! Wir wissen alle, was unser Verein Culture et Bilinguisme de Lorraine-Zweisprachig unsere Zukunft Ihnen schuldet. Ganz sicher: nach Ihrem jahrzehntelangem, treuem Engagement werden Sie uns weiterhin begleiten!

Votre lettre m’a interpelé ; en fait elle va tout à fait dans le sens de ma réflexion personnelle. Et je ne peux qu’adhérer au bilan quelque peu désabusé que vous dressez.

Dans cette chronique je suis dans le rôle de celui qui pousse « le coup de gueule » -pardonnez l’expression. Alors permettez-moi d’y aller un peu plus brutalement. Et commençons par ces facteurs que vous citez et que nous avons coutume de pointer du doigt. « Le pouvoir politique » ? Disons-le franchement : la République qui ne respecte pas ses citoyens et voudrait gommer toutes les différences, couler les français dans un moule commun ; « nos élus », petits et grands ?  Ardents à vouloir se faire « plus français que les français » ; « les associations » ? Pour certaines d’entre-elles de doux rêveurs qui voudraient transformer leurs dogmes en réalité…. Tout cela est exact.

Mais je voudrais ajouter à cette énumération un autre élément ; et plus j’y réfléchis, plus il me semble primordial, voire même induire tous les autres. Je nomme les « Mosellans » : les Mosellans germanophones, d’expression dialectale, thiois -comme on veut- et ajoutons tous ceux qui ne parlent plus le dialecte, ne le parlent pas, bref les mosellans de notre région. Qu’avons-nous fait, que faisons nous, nous Mosellans, pour défendre notre patrimoine linguistique et culturel, notre originalité et pourquoi pas.. notre identité ?

Tout le monde a le droit, le devoir de s’opposer, de se dresser, de revendiquer dans le sens de son intérêt. Certes cela peut coûter très cher, selon les endroits et les circonstances dans lesquelles on se trouve. Rien de tel pour nous : en France, il n’y avait, il n’y a aucun risque à revendiquer son bon droit. Et pourtant nous ne le faisons pas, comme le font d’autres français, dans d’autres régions.

Pourquoi cette apathie ?

On peut apporter différents arguments. Le but n’est pas ici de faire une étude exhaustive de tous les facteurs qui ont influé, qui influent sur ce désintérêt. Citons-en quand même quelques-uns, pêle-mêle.

Il y a cette forme de « mal être » qu’on a instillé aux Mosellans il y a un siècle et qui poursuit nombre d’entre nous de manière inconsciente, sournoise . Une jeune femme à laquelle je disais il y quelques temps que mon grand-père avait servi sous le Kaiser, me fit la réponse suivante : « mais, il n’a pas eu honte de trahir ? » Témoignage d’un passé non assumé.

Il y a cette résignation, ce comportement atavique qui nous mène à courber l’échine dans l’adversité : héritage d’une histoire mouvementée qui nous a appris à survivre en composant avec la situation. Nos amis alsaciens, eux, savent s’affirmer.

Il y a l’ignorance, la méconnaissance des réalités locales. Un ancien mineur de mon village auquel je posais la question : « Ja, wat ìss dânn dat Ditsch, wù mir schwätzen?», me répondit : « ach, dat ìss kéi richtig Spròch, dat ìss eppes, wù mir vèn d’r Grùw mìtbraat hânn ». Il a fallu que je lui rappelle, qu’enfant -il n’était pas encore mineur- on ne parlait que ce dialecte à la maison, que ses grands-parents qui n’avaient jamais mis un pied à la mine, parlaient cette même langue. Ce brave homme n ‘avait en fait aucune conscience du lien qui unit le dialecte et la Hochsprache, qu’il savait par ailleurs très bien parler avec ses parents rhénans !

Il y a cette argumentation fallacieuse qui a été distillée, avec l’aide des maîtres de l’école, encore au lendemain de la seconde guerre mondiale : « parler le dialecte nuit à l’apprentissage du français » ; « on ne peut apprendre deux langues à la fois », « parler le dialecte diminue les chances sociales de nos enfants » ; et toute une génération de parents – pas les miens – s’est mise à (ne plus) parler (qu’)en français aux enfants, provoquant ainsi une perte de compétence langagière dramatique.

Il y a -et j’en terminerai là- cette génération actuelle de jeunes et moins jeunes qui se laisse envoûter par les sirènes du discours public qui voudrait que la lingua franca soit ou devienne l’anglais, la mode à l’espagnol et que l’allemand « ça ne sert à rien», comme le martelait récemment un journaliste bien connu sur une radio nationale.

J’en passe.
Mais encore…
Car nous sommes là au cœur du problème.
« Lueur d’espérance »  ?

Comment faire prendre conscience à nos concitoyens qu’ils sont partie prenante, acteurs d’une communauté avec SA langue et SA culture particulières, au même titre que les Bretons en Bretagne, les Basques en Pays Basque ou les Corses et d’autres. Et par voie de conséquence, comment faire en sorte que nos concitoyens s’associent à l’exigence de reconnaissance et au respect de leur droit. Comment faire en sorte qu’ils s’engagent pour la préservation et la défense de leur droit ?

Il existe des associations qui se donnent pour mission de cultiver cette culture locale, des individualités qui portent ce projet. C’est très bien ! Mais tout cela apparaît au commun de nos concitoyens tellement décalé que cela devient presque de l’ordre du folklore.

CBL, notre association, est confrontée au même problème.
Manque d’adhésion, manque d’engagement à l’interne, manque d’audience, manque de recrutement à l’externe, manque de renouvellement….

« Lueur d’espérance », dites-vous en citant quelques initiatives ça et là.
Pas tant que les Mosellans ne se prendront pas eux-mêmes en main !

Aide-toi et le ciel t’aidera !

Armand Zimmer

Barrières linguistiques / Sprachbarrieren :

Un autre exemple / Ein anderes Beispiel

Über Sprachbarrieren in Familien
Von Linh Reuter 14. September 2023

 

Über die Sehnsucht nach der Sprache des Vaters © Elif Küçük für ze.tt

Wenn ich gefragt werde, woher ich komme und ich die Neugier meines Gegenübers befriedige und erkläre, dass mein Vater vietnamesisch ist, folgt darauf oft schnell die nächste Frage:  

Sprichst du Vietnamesisch?  

Vor dieser Frage fürchte ich mich, denn vor der Antwort schäme ich mich. 

Vietnamesisch ist eine Fremdsprache für mich. Mein Vater spricht eine mir fremde Sprache. 

Mein Vater hat Vietnamesisch mit mir gesprochen, bis ich zwei Jahre alt war. Dann hat er beschlossen, sein Deutsch zu verbessern und nur noch Deutsch mit mir zu reden. Das Ergebnis: Sein Deutsch ist immer noch schlecht und mein Vietnamesisch nicht existent.

Actualité / Aktuelles :

  • Ouverture d’un « Club Langue et Culture Régionale » au collège de Lemberg à la rentrée : bonne nouvelle !
  • Le Goethe-Institut a décidé, pour des raisons financières, de fermer l’antenne de Strasbourg : mauvaise nouvelle !
  • La tradition allemande des Schultüten est toujours honorée en Moselle:les élèves entrant à l’école élémentaire des 59 communes proposant un enseignement approfondi de l’allemand ont eu le plaisir de se voir remettre une Schultüte, un cornet comprenant du petit matériel scolaire, quelques friandises...

   

Un concert transfrontalier / Ein grenzüberschreitendes Konzert

Notre association Culture et Bilinguisme de Lorraine et l’Association pour la Promotion du BilinguismeElvis Stengel ont organisé conjointement à Sulzbach (en Sarre) le 16 septembre dernier un concert de l’artiste lorrain, Elvis Stengel. Accompagné par sa fille Céline au piano, le poète, auteur-compositeur-interprète (agriculteur bio dans le civil) a présenté ses propres chansons en platt, en français et en Hochdeutsch, ainsi qu'un répertoire d'auteurs-compositeurs français et allemands comme Reinhard Mey, Hannes Wader, Bett ina Wegner, Jacques Brel et Renaud.

L’assistance, nombreuse, a goûté avec grand plaisir ce moment d’échanges bilingues, transfrontaliers et transculturels.

 concert elvis stengel
 
 
 
 
 
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